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Travailler pour soi et non pour l’État depuis le 18 juillet
Avec une pression sociale et fiscale de 54,4 %, les salariés français restent en 2025 les plus ponctionnés d’Europe, selon l’Institut Molinari. Il leur faut attendre le 18 juillet pour disposer librement de leur rémunération, après avoir acquitté impôts et cotisations. Un fardeau qui pèse sur leur pouvoir d’achat, bien plus que dans la majorité des pays européens.
La France conserve son triste record
C’est devenu une tradition estivale. Chaque année, l’Institut économique Molinari, en partenariat avec EY, publie une étude sur la pression fiscale et sociale réelle subie par le salarié moyen en Europe. En 2025, la France conserve la première place du classement, avec une libération fiscale et sociale fixée au 18 juillet. Autrement dit, le salarié moyen français travaille plus de la moitié de l’année pour financer l’État et la sécurité sociale, avant de percevoir le fruit net de son travail.
La charge globale – comprenant cotisations patronales et salariales, impôt sur le revenu et TVA – atteint 54,4 %, en légère hausse (+0,4 point) par rapport à 2024. Ce taux dépasse celui observé en Belgique (54 %) et en Autriche (53,4 %), respectivement deuxième et troisième du classement. À titre de comparaison, la moyenne européenne se situe à 44 %, et dans 23 pays de l’UE, les salariés retrouvent leur liberté fiscale bien avant les Français.
Dans l’Hexagone, un salarié moyen coûte 62 282 euros par an à son employeur, mais ne conserve que 28 400 euros nets après charges. La ventilation est sans appel : 56 % des prélèvements sont constitués des cotisations patronales, 30 % des cotisations salariales, 8 % de l’impôt sur le revenu, et 6 % de la TVA. Autrement dit, les cotisations sociales à elles seules (29 158 euros) dépassent le montant du salaire net (28 400 euros), ce qui place la France en tête de l’Union européenne sur ce critère.
Ce décalage structurel fait peser une pression importante sur le pouvoir d’achat des actifs. Dans un graphique Datawrapper cité par l’étude, il faut 119 euros de charges et d’impôts en France pour obtenir 100 euros de revenu disponible, contre 117 euros en Belgique, 114 euros en Autriche et seulement 107 en Allemagne. La moyenne européenne s’établit à 80 euros. En d’autres termes, le salarié français doit travailler plus pour obtenir moins.
Un modèle coûteux mais pas plus performant
Les auteurs de l’étude pointent les failles du modèle français : un niveau de prélèvements record sans garantie d’une meilleure efficacité des services publics. Si la France consacre 31,3 % de son PIB aux prestations sociales – un sommet européen – elle n’arrive qu’en 9e position en dépenses sociales par habitant, derrière des pays comme la Suède, les Pays-Bas ou le Danemark, qui fiscalisent pourtant moins leurs salariés.
Le déséquilibre est particulièrement marqué sur les retraites, principal poste de dépenses sociales. En France, 12 100 euros de cotisations retraite sont prélevés par an sur le salarié moyen, essentiellement en répartition. Mais cette contribution élevée n’assure pas une meilleure pension : la France ne se classe qu’au 11e rang en taux de remplacement futur, malgré un taux de cotisation retraite de 28 % du salaire brut, bien supérieur à la moyenne européenne (21 %).
À l’inverse, les pays ayant développé la capitalisation collective – comme le Danemark ou les Pays-Bas – offrent un rendement supérieur pour un effort moindre. Les salariés danois, par exemple, perçoivent à la retraite en moyenne 77 % de leur salaire en cotisant seulement 13 % de leur rémunération.
Ce sous-développement de la capitalisation retraite en France génère un coût économique majeur : seulement 13 % du PIB était placé dans des produits d’épargne retraite fin 2024, contre 92 % dans l’ensemble de l’OCDE. Cela représente un manque à gagner de 80 à 160 milliards d’euros par an, selon que l’on compare à la moyenne de l’OCDE ou aux champions européens (Danemark, Suède, Pays-Bas). En équivalent individuel, l’Institut Molinari chiffre à 1 700 à 3 400 euros par personne la « taxe implicite » liée à ce retard d’épargne.
Enfin, l’étude souligne que plus de fiscalité ne rime pas avec plus de bien-être. La France se classe seulement 21e sur 27 en termes de satisfaction dans la vie, selon les données Eurostat. Comme le résume Cécile Philippe, présidente de l’Institut : « Il n’y a pas de raison que service public rime avec cher et médiocre. »
Sources : Institut économique Molinari, étude “La pression sociale et fiscale réelle sur le salarié moyen dans l’UE en 2025”, EY, Eurostat. L’étude complète et les données sont accessibles ici : institutmolinari.org